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L’impeccable archer - Monseigneur Nasrallah Boutros Sfeir

 

 
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L’impeccable archer - Monseigneur Nasrallah Boutros Sfeir
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L’impeccable archer par Michel Rouvière

Au-delà des controverses politiques, suites aux déclarations politiques du Patriarche Monseigneur Béchara Boutros Raï lors de son voyage à Paris, je voudrais que vous me permettiez de souligner les qualités exceptionnelles de linguistiques et de la finesse d’esprit de Monseigneur Nasrallah Boutros Sfeir. Revenons aux dernières confusions d’expressions. Le fait est tout à fait naturel; la vie de tous les jours n’est-elle un quiproquo perpétuel? En amour, en affaires ou dans la vie familiale comme professionnelle, vous dites une chose, votre interlocuteur vous répond autre chose. On s’étonne à moitié. Puis on recommence avec d’autres mots. On se comprend encore à demi. On abrège sans trop insister. Le temps presse. On ne veut ni passer ou faire passer son vis-à-vis pour un ignare. Finalement on se sépare en espérant tirer tout cela au clair dans une prochaine rencontre. Ainsi va la vie. Le monde continue de tourner. Pourtant dans l’ordre naturel de la physique mathématique, il paraît que ses constantes, sont d’une précision extraordinaire.

Pour un homme atteignant l’âge vénérable de 91 ans ; le corps pourrait éprouver une faiblesse dans ses capacités. Avec en plus une longue vie sacerdotale, nous abordons une profonde expérience spirituelle. Ajoutons les 25 ans de patriarcat, dans une période de confusion très explosive. Cette dernière marche hiérarchique acéra sûrement la vision des monstrueuses passions humaines. C'est ainsi, qu’il a pu voir toute une humanité dans ses espérances, ses orgueils, ses douleurs, ses vanités, ses joies. D’abord aux travers de la confession personnelle donnant l’absolution aux pêchers avoués en tant que prêtre. Ensuite par les longues réceptions patriarcales quotidiennes. Elles élargirent le panorama ; beaucoup de plaintes et de demandes peu d’offres. Le théâtre du monde était complet et même un peu répétitif. Je suppose.

Ajoutons encore un Office Saint chaque jour au travers du mystère de la Sainte Eucharistie ; Dieu incarné venant parmi les hommes pour annoncer la Bonne Nouvelle, puis incompris, il est crucifié. Il y aurait de quoi radoter un peu, même en tenant compte de la Résurrection du Rédempteur. Dans une sorte de confusion de la mémoire, l’amertume pourrait prendre place. Luttant contre l’oubli dans le coin d’un souvenir, on chercherait un mot, un nom, un fait, afin de justifier notre lassitude, désabusé.

J’ai eu l’honneur de rencontrer Sa Béatitude deux fois à vingt ans d’intervalle. Monseigneur Nasrallah Sfeir est devant vous. Stable et tranquille il vous observe avec sérieux, et aménité. Son état physique ne montre aucune faiblesse naturelle. Elle serait normale avec les épreuves du temps. Nous pouvons y voir une grâce exceptionnelle. La première fois c’était en 1990 à la fin d’octobre. Les circonstances étaient assez exceptionnelles en cette année du diable pour le peuple Maronite. Simultanément le peuple Allemand vivait son année angélique de la réunification sans un coup de fusil, malgré deux armées formidables se faisant face avec un antagonisme idéologique exclusif. La seconde fois en mars 2011 quand sa démission ayant été acceptée par le Vatican, son successeur avait été élu. Le nouveau patriarche était alors, à Rome pour recevoir son investiture plénière.

Physiquement seul une plus grande abondance d’argent dans ses cheveux et sa barbe soignés, marquait son visage. Bien sûr il y avait toujours quelques rides anciennes plus profondes. De nouvelles faisaient leur apparition. Ce qui me frappa de premier abord c’est l’éclat vif des yeux qui avec un sourire sérieux, montraient un esprit toujours aussi disponible à saisir au vol la moindre allusion. Tout en restant attentif dans le plus grand calme. On sent que rien ne presse. Immédiatement nous sommes de plein pied. Je me demande si je ne m’illusionne pas, mais un mot, un seul mot, accompagné de son sourire, me montre une parfaite compréhension.

1990
……
« Comment Monseigneur avez-vous fait pour supporter ces dix-huit derniers mois sans exploser de colère en envoyant tout promener. Il faut une grâce particulière de la Providence ;
- Soyez sans crainte, je ne suis qu’un homme, me répond-t-il avec un sourire de bon humeur.
…..
- Quel miracle faudrait-il demander à la Vierge ? Convertir les Musulmans ? Dis-je

Le Patriarche me regarde à demi interrogatif, avec un visage tournant vers le sévère ; à qui ai-je affaire ? En cette saison la folie était fort fréquente même après le soulagement du samedi 13 octobre. Elle courait par tous les chemins du Keserouan et du Mont Liban.

- Le vrai miracle, continuai-je en montant un peu le ton, ce serait de rendre les chrétiens, chrétiens »

Monseigneur à l’instant même, eut un plein sourire radieux. Effectivement à cette époque là il y avait tant de haine entre Maronites ! Elle s’exprimait le plus souvent par des mots. La charité semblait avoir déserté les esprits.

2011
……

Monseigneur vous connaissez le colonel Barakat ?

- Oui, me répond-t-il les yeux rieurs

- Le lieutenant Ghattas ?

- Oui, la connivence se confirme en joie

- Quand je mourrai, je demanderai à Dieu pourquoi il nous a envoyer un général et ce général là

…..

- J’ai failli envoyer un article s’intitulant : « La faute du Pape » au sujet de l’acceptation de votre démission. Finalement j’y ai renoncé.

- Vous avez bien fait, me dit-il d’une voix ferme et tranquille.

….

- Je n’ai rien contre Monseigneur Raï…..mais…. mais….vous regardez Télé Lumière ? ..... Bien que je ne comprenne pas l’arabe …..

Dans un franc sourire plein d’indulgence fraternelle il me répond

- C’est trop.

Pas un mot de plus.

….

« Monseigneur, je vous avais rencontré il y a longtemps, vous ne vous en souvenez peut-être pas, c’était l’année du diable.

- Il n’ y a eu qu’une année du diable ! , me répond-t-il avec un sourire complice.

- C’est vrai, il y en a eu plusieurs mais celle-ci était vraiment diabolique. C’était quand les Forces libanaise et l’Armée se battaient et s’injuriaient.

- 1989, intervient son secrétaire »

……

« Mon ami Marc, professeur de Sciences Politiques, après avoir visité le sud vient passer un court moment dans notre secteur. J’essaie de lui expliquer les différences entre les Kataebs, les Forces Libanaises et les Oranges….

- ….et vous lui avez expliqué ?... Me coupe Monseigneur avec un sourire entendu charmant

- …A peu près. Continuai-je en m’aidant des mains tout en ayant un sourire de connivence. »

…..

Monseigneur s’adresse tranquillement à mon ami Marc ;

- Qu’avez-vous vu au sud ?

Pas un mot de plus. Et voilà mon ami faisant un compte rendu verbal de sa visite. Monseigneur est tout ouïe. Il ne l’interrompt pas une seule fois. Il fait son miel de l’expérience de mon ami.

…..

Mon ami s’adresse à Monseigneur.

- Monseigneur, que pensez-vous de ce début de Printemps Arabe vis-à-vis du Liban ?

Avec un temps de silence, dans le soir éclairé par le soleil couchant d’un salon de Bkerké donnant sur la mer, la voix du prélat répond avec le même rythme et le même sérieux que si elle s’adressait à un ambassadeur. Subitement le silence est aussi tendu que dans une salle de tir à l’arc d’un temple japonais.

- Nous sommes un pays de 17 communautés et il est normal qu’il y ait toujours quelques rivalités. Nous avons aussi des voisins turbulents et il ne faudrait pas qu’ils profitent de nos problèmes internes pour s’immiscer dans notre pays.

Deux phrases, pas plus, bien articulées ont suffit. « Les voisins turbulents » viennent exactement à point dans l’énoncé. Je suis étonné par la justesse d’attitude et surtout des mots. Tout est en économie et en silence choisis. Il n’y rien à reprendre, ni à ajouter.

Voilà deux extraits de quelques rencontres si brèves pourtant dans une vie mais qui peuvent donner le ton pour tout le reste. A ces quelques phrases, il faut surtout les compléter avec un silence attentif, et plein d’une véritable écoute. Après ce temps de pose, qui peut paraître un peu long à un esprit impatient comme moi, la flèche de la réponse vient. Elle part, brève, exacte, juste, sans acrimonie ni agressivité. Mais toujours l’archer a ce visage sérieux avec une légère pointe d’un sourire indulgent. Il se demande s’il a bien atteint le but visé. En avez-vous bien saisi le sens ? A-t-il bien choisi les mots ? Si vous êtes d’un esprit juste, droit et que vous preniez le temps de réfléchir, vous constatez que c’est l’exactitude même. Cette constante d’envoyer les flèches des phrases toujours dans le mille peut rendre nerveux ceux qui utilisent l’artillerie lourde. Celle qui traite l’objectif par zone dans le rectangle de dispersion. D’autres se rapprochent et arrosent de mots le but visé. Dans les propos de Monseigneur Nasrallah Sfeir il y a une sorte de perfection dans l’économie des mots. C’en est parfois presque gênant.

« On ne change pas de Président par la rue. Ce serait une faute majeure » Alors qu’en plein Révolution du Cèdre le peuple était prêt à bondir vers Baabda.

L’Onu, et le Ministre des Affaires Etrangères de France lui demandent une liste de noms pour l’élection présidentielle libanaise. Il répond : « C’est inutile, nous l’avons déjà fait auparavant ». Cependant par courtoisie il remettra ces fameux noms.

Je me suis posé souvent la question d’où vient ce talent si parfait dans l’usage des mots. Il oblige à toute une attitude de vie. Bien évidemment j’y vois d’abord la marque d’une faveur providentielle. Cette grâce se révéla dans sa jeunesse paraît-il dans sa méticulosité envers les versions qu’il devait corriger lors de son passage au séminaire de Ghazir.

Il n’en reste pas moins que cette constance et cette maîtrise du verbe méritent d’être salué. Parfois certains préfèrent des esprits taciturnes. Au moins le silence permet à chacun d’interpréter les plans du chef comme vous l’entendez. Des politiciens réalistes, y voient une force. D’autres plus rusés se cachent dans l’ambiguïté afin d’avancer sur plusieurs tableaux, mais quand ils en sortent c’est toujours à leur désavantage avec une certaine perte.

Enfin, n’existe-t-il pas un proverbe disant que la parole fut inventée pour tromper ? Cette maxime est du pur cynisme. Le mensonge devient la règle. Par intention ? Pas toujours. Il peut y avoir aussi une auto illusion. Pareil à un démiurge, par des mots je crée un monde en l’interprétant suivant mes phantasmes obsessionnels ou mon idéalisme. Au plus haut sommet de ce délire ce n’est plus un mensonge mais une incantation. Le monde doit s’adapter à vos mots. Parfois tout un grand peuple s’y laisse prendre. Au milieu des tensions internes du Liban le verbe a une force passionnelle particulière. Faut-il rappeler toutes les phrases extravagantes dites avec le ton de la certitude révélée ? Prenons les mots « martyr » et « Résistance », observez leurs usages durant les dernières décennies. Que de métamorphoses !

Avec Monseigneur Nasrallah Sfeir dans les éphémérides nous ne retrouvons pas un mot à reprendre sur tout son mandat patriarcal. Non seulement il disait les mots exacts, mais ceux-ci traversent le temps. Souvenez-vous quand certains les trouvaient trop complaisant vis-à-vis de la Syrie durant l’année du diable ? De plus aux agressions verbales il répondait par une invariable sérénité. Elle ne faisait que mettre en relief les maladresses d’expressions de ses contradicteurs. Ils se trouvaient obligé de reprendre leurs propos avec d’autres mots.

Une certaine amertume envers l’infirmité de humanité dans ses limites, aurait pu le rendre acide et légèrement misanthrope avec des effets hypocondriaques. Sur un autre versant il aurait pu tomber dans la mélancolie avec une vision neurasthénique du monde. Monseigneur Nasarallah Sfeir choisit toujours le mot exact. Il peut l’exprimer avec un corps en parfait équilibre, avec une voix claire. Il y a dans sa vision du monde, même un côté amusé plein d’indulgence qui lui donne un parfum de jeunesse assez époustouflant. Si on aime le sel de la terre on souhaite le suivre un peu plus loin dans une conversation aux longs silences pleins d’instructions pour qui sait entendre.
Tue Sep 27, 2011 10:47 am View user's profile Send private message Send e-mail Visit poster's website
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